L’éveil. La nuit me dépose. Encore flou, le silence demeure. Puis l’arche se dessine, la politesse des lieux m’accueille en diligence. Déjà tu es là.
Le lit me laisse aller, m’accompagne un instant, me caresse les mollets de son velours massif. La moquette me transporte. Et la douceur t’invoque, brusquement, sur ma peau.
Bientôt, l’eau me reçoit dans sa chaleur discrète. Elle me parle au pinceau, sous l’étreinte engageante de son intimité ; et c’est toi qui m’appelle au dehors de sa voix.
Puis les mets me retrouvent. Sur la table honorée, tous m’invitent au dialogue d’une langue abondante, au service ciselé. Et ta bouche s’ouvre alors dans chacun des échanges.
La lourde porte en bois, qui me protège encore, me garde son respect. Elle veille mes initiales. Son salut m’encourage, m’envoie d’une main amie dans l’ardeur journalière. Tu es proche, maintenant.
Sur le flanc de la pierre dans leurs carreaux vernis, les parures alors, m’attirent et m’observent. Elles me flattent d’un éclat délicat, franc, bleu, me sourient, m’apprivoisent, n’aspirent qu’à me séduire. L’incitation est pure, l’obligeance confortable ; elles m’enlèvent un instant au trouble populaire, et la boutique m’avale. Et le collier triomphe, m’accroche à son destin pour quitter le repaire. Et soudain, c’est la peau de ton cou dans ma poche, dans ma main.
Sur quelques mètres enfin, les restaurants m’honorent de leurs promesses. Leurs cartes m’apostrophent, me courtisent en termes choisis ; elles veulent me ravir aux solitudes futures. Mais derrière leurs aimables adresses, la tienne, seule me saisit.
Enfin, tu apparais.
Chaque jour me mène à toi, dans le contraste effroyable de nos vies.
Tu dors sur le béton, emmitouflée, trônant dans tes sacs sous le M en néon.
Tu sens que je sers dans ma poche le bijou, presse le pas, lève le regard.
Tu sais que j’abolis l’instant.
Toi, l’image que je replie pour accepter mon innocence.
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